Abus de minorité
Qu’est-ce que l’abus de minorité ?
L'abus de minorité est une pratique abusive qui se produit lorsqu'une minorité se sert de sa position dominante pour obtenir des avantages indus par rapport aux autres actionnaires ou nuire à l'intérêt social. Le Code de commerce ne donne pas de définition de la notion. C'est donc la jurisprudence qui a défini progressivement les contours, comme c'est le cas pour la notion qui est en quelque sorte inverse : l'abus de majorité.
Quels sont les cas typiques d'abus de minorité en droit des sociétés ?
Il existe plusieurs sortes d'abus de minorité.
Il peut s'agir d'un abus de minorité négatif pour bloquer une prise de décision ou une opération essentielle qui est conforme à un intérêt social. C'est le cas quand une assemblée générale s'oppose aux associés majoritaires et favorise ses intérêts en poussant pour le versement de dividendes alors que la société avait un besoin de réinvestir ses bénéfices.
De même, le refus par un actionnaire minoritaire de voter une augmentation de capital peut constituer un abus de minorité si cette opération est nécessaire à la survie de la société. Mais dans ce cas, il faut bien entendu que la société ait produit des informations claires, spécifiques et circonstanciées sur l'utilité de cette opération lors de l'assemblée générale.
Mais l'objectif peut également être de nuire à d'autres actionnaires. Une minorité de blocage peut ainsi demander abusivement la nomination d'un expert ou bloquer une opération de vente. Il arrive également qu'un associé minoritaire exige la nomination d'un administrateur provisoire ou pousse pour désigner un mandataire. C'est ce qu'on appelle un abus de minorité positif, par opposition à un abus de minorité négatif.
Comment agir contre un abus de minorité ?
Les associés majoritaires qui s'estiment lésés peuvent bien entendu engager la responsabilité délictuelle des associés minoritaires afin d’obtenir des dommages et intérêts. Dans ce cas, il faut bien entendu être en mesure de faire la preuve d'un préjudice mais aussi démontrer un lien de causalité avec la faute commise par les associés minoritaires.
La prescription pour cette action est de cinq ans à compter de l'abus de minorité. Il faut directement la diriger contre le ou les associés minoritaires. Une des difficultés réside dans la lenteur de cette contre-mesure puisque la justice peut prendre plusieurs années à sanctionner l'abus de minorité, ce qui peut compromettre la viabilité de l'entreprise.
Ainsi, pour défendre leurs propres intérêts et contourner le blocage dans la prise de décision, il faut demander judiciairement la désignation d’un mandataire ad hoc qui sera chargé de représenter les associés minoritaires lors d’un nouveau vote et de procéder à un vote dans l’intérêt social.
Attention, si un administrateur judiciaire est désigné en qualité de mandataire ad hoc pour représenter un associé minoritaire et voter en son nom, il n'est pas possible de lui imposer de consignes de vote, même dans le cadre d'une assemblée générale extraordinaire. En revanche, le mandataire ne peut opposer aux minoritaires le secret professionnel tiré de son statut d'administrateur judiciaire pour refuser de lui rendre compte de l'exécution de ce mandat.
Quelles sont les sanctions prononcées par la jurisprudence contre un abus de minorité ?
Devant les juridictions françaises, l'abus de minorité a tendance à être accueilli plutôt favorablement.
Les juges considèrent souvent, sur le fondement de l'article 1833 du Code civil, que "l'abus de minorité consiste en l'attitude d'un associé contraire à l'intérêt général de la société en ce qu'elle interdit la réalisation d'une opération essentielle pour celle-ci, et dans l'unique dessein de favoriser ses propres intérêts au détriment de ceux de l'ensemble des autres associés" (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3ème Chambre, 19 mai 2022, n° 19/03850).
Cela peut amener le juge à annuler l'assemblée générale durant laquelle l'abus de minorité s'est constitué et à prononcer des dommages-intérêts pour compenser le préjudice des actionnaires majoritaires.
Dans certains cas particulièrement graves, la jurisprudence peut aller jusqu'à exclure l’associé si le manquement est suffisamment important pour le justifier. Si jamais cette mésentente compromet le fonctionnement de la société ou lui fait perdre son intérêt social, ce qui est le cas extrême, la dissolution de l'entreprise peut être prononcée. S'agissant de la durée moyenne de la procédure et des principales jurisprudences en la matière, vous trouverez toutes les informations ci-après.
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