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251 décisions

Déni de justice

Qu'est-ce qu'un déni de justice ?

Le déni de justice caractérise une situation où un ou des juges refusent de juger une affaire ou font preuve de négligence dans le traitement des dossiers, susceptible d'engager leur responsabilité pénale ou la responsabilité de l'Etat. L'existence de cette procédure est un moyen procédural de garantir un recours effectif au juge et de veiller au respect des principes directeurs du procès civil visés aux dispositions liminaires du code de procédure civile.

L'article 4 du code civil dispose ainsi que "le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice". Il est complété par l'article L 141-3 du code de l'organisation judiciaire, qui précise qu' "il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou négligent de juger les affaires en état et en tour d'être jugées".

Quels éléments sont susceptibles de constituer un déni de justice?

  • Un refus caractérisé et délibéré de juger : le juge qui ne répond pas aux requêtes des justiciables, qui refuse de réaliser les diligences ou actes de procédure nécessaires, etc.

→ A titre d'exemple, viole l'article 4 du code civil la juridiction qui refuse d'évaluer le montant d'un dommage ou d'une créance dont elle a constaté l'existence en son principe : le juge ne peut ni déléguer cette évaluation à un tiers notaire (Cour de cassation, 1ère Chambre Civile, 24 septembre 2014, n° 13-21.005), ni se prévaloir de l'insuffisance de preuves fournies par une partie (Cour de cassation, 2ème Chambre Civile, 2 juillet 2020, n° 19-16.100).

  • Des actes de négligence manifestes, qui conduisent à des délais de procédure anormalement longs

→ Une durée anormale du délibéré d'un Conseil de Prud'hommes sur 14 mois a pu caractériser un déni de justice (Cour d'appel de Nîmes, 1ère Chambre, 6 octobre 2022, n° 21/03293). 

L'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'Homme (CEDH) est souvent invoqué par les parties ou fonde la motivation du juge, qui reprend la définition extensive de la Cour européenne des droits de l'Homme, considérant qu'un déni de justice peut être caractérisé dès lors qu'il existe un manquement de l'Etat à son obligation d'assurer un service public de la justice efficace et respectueux du droit et des intérêts procéduraux des parties.

✏️ En revanche, ne sont pas des dénis de justice : le fait que le juge ne rende pas une décision qui nous est favorable, la remise en cause d'une décision en appel, un classement sans suite, la remise en cause de l'appréciation portée par un juge sur un dossier (sur ce point, voir le jugement du Tribunal administratif de Lille, 8 août 2022, n° 2205135).

Quelles responsabilités pour un déni de justice?

Sanction pénale individuelle

Le magistrat qui commet un déni de justice et persévère malgré injonction encourt une sanction pénale en ce qu'il entrave le bon fonctionnement de la justice, prévue à l'article 434-7-1 du code pénal. Il peut être condamné à une amende de 7 500 euros et à l'interdiction de l'exercice des fonctions publiques pour une durée de cinq à vingt ans.

Action civile en responsabilité de l'Etat

Selon l'article L 141-1 du code de l'organisation judiciaire, l'Etat est civilement responsable des dommages causés par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, caractérisé soit par une faute lourde, soit par un déni de justice. Il lui appartient ensuite d'introduire une action récursoire contre le magistrat qui a commis une faute personnelle se rattachant à l'exercice du service public de la justice.

→ L'action est introduite à l'encontre de l'Agent judiciaire de l'Etat, devant le Tribunal judiciaire de Paris ou le Tribunal judiciaire du lieu où la décision générant la procédure de déni de justice a été rendue.

Préjudices réparables

Lorsqu'un déni de justice est caractérisé, il est possible de prétendre à réparation du dommage causé, à condition que la faute commise par le service public de la justice soit en lien de causalité direct et certain avec les préjudices. Il peut s'agir d'un préjudice moral, caractérisé par le seul dysfonctionnement, ou d'un préjudice matériel, lorsque des conséquences financières résultent du refus ou du délai anormalement long.

Quel est l'état de la jurisprudence sur le déni de justice?

L'analyse du contentieux en la matière, proposée par Predictice, permet de constater que le taux d'acceptation est relativement bas s'agissant du déni de justice. La mise en œuvre d'une telle action est en effet soumise à des critères strictes d’appréciation pour éviter une remise en cause systématique du fonctionnement des juridictions françaises et assurer une certaine sécurité juridique.

La question des délais de procédure ou de jugement cristallise souvent les débats. Néanmoins, il faut avoir en tête que le déni de justice ne peut être soulevé que si la longueur de la procédure est imputable à une négligence du magistrat, et non dans le cas où le retard est lié à des actes procéduraux (renvois, mesures d'instruction, manque de diligences des parties, etc.).

Les juridictions rappellent en effet régulièrement que la seule durée de la procédure, quand bien même elle est "objectivement longue, ne constitue pas à elle seule la démonstration d'un caractère fautif et anormal du déroulement de l'instance" (Cour d'appel de Paris, 1ère Chambre, 3 novembre 2009, n° 08/21429), mais que "le caractère déraisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie à la lumière des circonstances propres à chaque espèce", à savoir la nature et le degré de complexité de l'affaire, le comportement des parties et les mesures mises en œuvre par les autorités compétentes.

→ C'est en considération de ces critères que la juridiction estime qu'aucun manquement autre que le seul délai de la procédure ne permet de caractériser un déni de justice, au regard de l'effectivité du suivi du dossier par le juge de la mise en état, et vu la multiplication des incidents de procédure imputables aux parties (en ce sens, Cour de cassation, 1ère Chambre Civile, 23 mars 2011, n° 10-11.013 ; Cour d'appel de Paris, 1ère Chambre, 3 novembre 2009, n° 08/21429). 

Données clés

Durée moyenne de la procédure

Entre la juridiction de première instance et la Cour d'appel, la durée moyenne est de 2 ans et 9 mois

Chefs de demande les plus couramment associés

Taux d'acceptation bas
125 demandes acceptées sur 251

Durée moyenne de la procédure

La durée moyenne entre la juridiction de première instance et la Cour d'appel est de 2 ans et 9 mois.
La durée moyenne entre la Cour d'appel et la Cour de cassation est de 1 an et 5 mois.

Décisions de référence

Acceptant le chef de demande
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