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Préjudice esthétique

Un préjudice prévu par la nomenclature Dinthillac

Le préjudice esthétique, classé comme un préjudice extrapatrimonial, vise à compenser les dommages esthétiques subis par la victime, en particulier les altérations de son apparence physique. Ce type de préjudice prend en considération la perception personnelle de la victime, son âge, son environnement, ainsi que l'impact que l'accident a eu sur son apparence, qu'il soit de nature temporaire ou permanente. Son évaluation tient compte de la perception des tiers ainsi que celle de la victime elle-même.

Le préjudice esthétique concerne toutes les parties du corps d'une personne et ne doit pas être confondu avec le préjudice du déficit fonctionnel (10-23.378) qui prend en compte les incapacités temporaires ou permanentes subies par une victime suite à un accident ou une maladie.

La nomenclature Dintilhac est un système de classification des préjudices corporels utilisé en droit français. Elle a été mise en place suite au rapport du groupe de travail dirigé par Jean-Pierre Dintilhac, président de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation de 2006 à 2008.

L'objectif de cette nomenclature est de proposer une liste exhaustive des différents préjudices susceptibles d'être subis par une victime d'accident corporel, afin de faciliter leur indemnisation.

Elle comprend deux grandes catégories de préjudices.

  1. Les préjudices patrimoniaux, qui concernent les atteintes à l'ensemble des biens de la victime, que ces biens soient actuels ou futurs, et qui sont divisés en deux sous-catégories : les préjudices patrimoniaux temporaires (par exemple, les frais médicaux, la perte de salaires pendant la période d'incapacité temporaire...) et les préjudices patrimoniaux permanents (comme la perte de salaires après consolidation, les frais d'assistance par tierce personne...).

  2. Les préjudices extrapatrimoniaux, qui regroupent les préjudices personnels de la victime, c'est-à-dire des préjudices qui atteignent la victime dans son corps, dans son esprit, dans ses sentiments, dans ses activités, et qui sont également divisés en deux sous-catégories : les préjudices extrapatrimoniaux temporaires (comme le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, le préjudice esthétique temporaire...) et les préjudices extrapatrimoniaux permanents (comme le déficit fonctionnel permanent, le préjudice d'agrément, le préjudice esthétique permanent...).

La nomenclature Dintilhac a permis d'unifier et de clarifier le droit de l'indemnisation du préjudice corporel en France.

Le préjudice esthétique temporaire

Le préjudice esthétique temporaire est un type de préjudice extrapatrimonial visant à indemniser les atteintes esthétiques subies par la victime et plus généralement l'altération de son apparence physique. Ce dernier prend en compte le ressenti personnel de la victime, son âge, son environnement et les conséquences de l'incident sur son apparence physique, que ce soit aux yeux des tiers ou de la victime elle-même. Le préjudice esthétique temporaire se distingue du préjudice permanent.

La nomenclature Dintilhac est venue définir le préjudice esthétique temporaire : « Le préjudice esthétique temporaire est l'altération de l'apparence physique, certes temporaire, mais aux conséquences personnelles très préjudiciables, liées à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré au regard des tiers ».

Ainsi, un préjudice esthétique temporaire peut se traduire par un dommage survenue à la suite d'un accident de la route comme une brûlure ou une cicatrice.

Conformément à un arrêt rendu le 7 mars 2019 (17-25.855) le préjudice esthétique temporaire est caractérisé par « l'existence d'une altération de l'apparence de la victime avant la date de la consolidation de son état de santé ».

Quelques exemples de jurisprudences concernant le préjudice esthétique temporaire

  1. Cour d'appel de Chambéry, 2ème Chambre, 14 juin 2018, n° 17/01203 : dans cette affaire, un homme qui a subi des blessures suite à un accident de voiture a été reconnue comme ayant souffert d'un préjudice esthétique temporaire au regard de l'usage d'un fauteuil roulant, puis de cannes anglaises pendant de longues périodes. La victime a été indemnisée de 2 000 euros.

  2. Cour d'appel de Bastia, Chambre Civile, 5 janvier 2022, n° 20/00325 : un enfant a été victime de morsures par un chien. Des morsures au visage qui lui ont causé une plaie frontale d'environ 1,5 centimètres, une petite plaie de la paupière gauche et du nez, des griffures au bras droit, une petite plaie de la cloison nasale ont permis une indemnisation de 1 500 euros.

  3. Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère Chambre, 10 novembre 2022, n° 21/14165 : un homme qui a subi une opération chirurgicale suite à une infection a été indemnisé à hauteur de 4 000 euros au titre de plusieurs cicatrices.

Le préjudice esthétique permanent

Dans le cas d'un préjudice esthétique permanent, il s'agit d'une altération de l'apparence qui est irréversible et qui a donc un impact durable sur la vie de la victime par exemple à la suite d'un accident de la route ou à une erreur médicale laissant une cicatrice apparente sur le visage d'une personne. Ce type de préjudice est inclus dans la nomenclature Dintilhac, qui établit les critères d'évaluation des dommages corporels en France.

La nomenclature Dintilhac est venue définir le préjudice esthétique permanent: « Ce poste cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l’apparence physique de la victime, notamment comme le fait de devoir se présenter avec une cicatrice permanente sur le visage. Ce préjudice a un caractère strictement personnel et il est en principe évalué par les experts selon une échelle de 1 à 7 (de très léger à très important) ».

Le préjudice esthétique permanent peut se traduire par une amputation, une malformation du visage, des brûlures importantes, des cicatrices visibles.

Quelques exemples de jurisprudences concernant le préjudice esthétique permanent

  1. Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1ère Chambre, 12 janvier 2023, n° 21/06186 : en l'espèce, une mannequin a été victime d'un accident de la circulation alors qu'elle était piéton. Les cicatrices qu'elle conserve de l'accident notamment sur la jambe l'empêche de poursuivre cette activité. L'expert a chiffré le préjudice esthétique permanent à 2,5/7. La victime a donc été indemnisée de 5 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent par la société BPCE.

  2. Cour d'appel de Toulouse, 1ère Chambre Section 1, 24 janvier 2023, n° 19/00760 : en l'espèce, la victime a subi une amputation fémorale suite à une infection nosocomiale contractée lors d'une intervention chirurgicale. L'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES a été condamné à verser 6 608,78 euros à la victime en réparation du préjudice esthétique permanent. L'expert judiciaire s'appuie sur le fait que le patient se présentait le plus souvent sur un fauteuil roulant, la marche avec prothèse de cuisse gauche articulée était possible mais difficile, avec boiterie importante et nécessitait deux cannes anglaises. Le préjudice esthétique permanent était estimé à 4,5/7.

  3. Cour d'appel de Colmar, 2ème Chambre A, 2 mai 2019, n° 17/03022 : dans cette affaire, une agente immobilière a consulté le médecin à plusieurs reprises pour des douleurs au pied gauche qui ont finalement nécessité une amputation transmétatarsienne. Une expertise médicale a été réalisée et a conclu que l'amputation était justifiée et que le médecin avait suivi les règles de l'art. Cependant, la Cour a statué que le médecin avait commis une faute médicale en ne prévenant pas les conséquences dommageables de l'amputation et en privant ainsi la victime d'une chance de les éviter. Celle-ci a été indemnisée à hauteur de 20 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent. Elle évoquait la contrainte d'un chaussage adapté, l'impossibilité de porter des chaussures ouvertes, des sandales, des chaussures à talons, une difficulté particulière pendant l'été, son refus de laisser voir son pied amputé, les soins quotidiens de son pied amputé, l'intervention de plusieurs professionnels dont elle devait supporter les regards, ce qui était une source d'angoisse et de gêne pour elle. Le préjudice esthétique permanent était estimé à 6/7 par l'expert.

L'indemnisation du préjudice esthétique

L'indemnisation du préjudice esthétique, qu'il soit temporaire ou permanent, est déterminée par plusieurs facteurs.

Un médecin expert évalue le préjudice esthétique sur une échelle de 1 à 7, 1 étant un préjudice très léger et 7 un préjudice très important. Cette évaluation tient compte de l'âge, du sexe, de la profession de la victime, et du retentissement du préjudice sur la vie personnelle et sociale de la victime.

Une fois le préjudice évalué, un montant d'indemnisation est déterminé. Il n'existe pas de barème fixe pour l'indemnisation du préjudice esthétique. Chaque cas est unique et l'indemnisation varie en fonction de la gravité du préjudice, des circonstances de l'affaire, de la jurisprudence, etc.

La victime ou son avocat présente la demande d'indemnisation au tribunal ou à l'assureur, en se basant sur l'évaluation du préjudice et la quantification de l'indemnisation.

Si la demande est acceptée, l'indemnité est versée à la victime. Dans le cas d'un règlement à l'amiable, le versement peut se faire rapidement. Dans le cas d'un procès, le versement a lieu après le jugement.

Lors de l’expertise, le préjudice esthétique est évalué sur une échelle de 0 à 7.

  • Préjudice Esthétique Permanent Très léger (1/7);

  • Préjudice Esthétique Permanent Léger (2/7);

  • Préjudice Esthétique Permanent Modéré (3/7);

  • Préjudice Esthétique Permanent Moyen (4/7);

  • Préjudice Esthétique Permanent Assez important (5/7);

  • Préjudice Esthétique Permanent Important (6/7) et;

  • Préjudice Esthétique Permanent Très important (7/7).

L'indemnisation peut être différente en fonction de la juridiction comme le montre le graphique ci-dessous.

Données clés

Durée moyenne de la procédure

Entre la juridiction de première instance et la Cour d'appel, la durée moyenne est de 2 ans et 6 mois
Taux d'acceptation très élevé
Environ 9 900 demandes acceptées sur 11 000

Durée moyenne de la procédure

La durée moyenne entre la juridiction de première instance et la Cour d'appel est de 2 ans et 6 mois.
La durée moyenne entre la Cour d'appel et la Cour de cassation est de 1 an et 6 mois.

Décisions de référence

Acceptant le chef de demande
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